La phrase optimiste du jour
Joie de voir l'obscurité au bout d'un tunnel de lumière trop vive.
Joie de voir l'obscurité au bout d'un tunnel de lumière trop vive.
En ce pays il y un étang, un étang différent de ceux du monde extérieur. Dans son reflet, on peut y voir le cube du dehors. A première vue la face exposée à la vue du pays désolé est parfaitement lisse. Mais à première vue seulement. Très vite on s'aperçoit que d'immenses tâches noires la traversent, plus sombres que la nuit la plus obscure. Elles semblent venir de l'arrière du cube. Et plus on regarde le reflet de cet étang, plus la multitude de ces taches nous apparaît, jusqu'à avoir l'impression qu'elles recouvrent totalement cette face. Tout autour du cube, on peut voir le reflet flou de créatures étranges. Le long des faces latérales, elles errent, jetant de temps en temps un coup d’œil à la paroi lisse qu'elles longent, évitant à tout prix de prolonger le regard plus de quelques instants, pour ne pas voir les taches et ne garder à l'esprit que l'image d'un cube parfaitement lisse. Au contraire, on peut en voir quelques unes rester assises à contempler la face de derrière, et on peut deviner comme un sourire béat sur leur visage évanescent. Comme la face de derrière doit être magnifique ! A moins que le fait que l'on ne puisse distinguer les yeux de ces créatures ne soit pas dû au flou du reflet, ni à leur éloignement. Puis les tâches sombres se font solides, et du reflet de la face la plus proche sort des flaques d'un goudron épais et visqueux. Celui ci s'étale sur les berges de l'étang, allant toujours plus loin, et continuant sans cesse à contaminer de nouveaux arbres survivants de la guerre. Leur tronc devient alors lui même noir, et leurs feuilles déperissent jusqu'à partir en poussière. Devant la puissance des autres belligérants, il est peu probable que ce soit l'étang qui vienne à bout de la dernière feuille du pays désolé. Mais il aura tout de même bien participé à sa destruction.
Je ferme les paupières, et regarde vers l'intérieur, las de contempler un monde sans relief, sans texture, sans saveur, sans plus d'intérêt qu'un petit cube de fer lisse devant lequel une bande de spectres s'extasie.
Ce que je vois, c'est une lande désolée. Ce pays est en guerre, une guerre qui oppose une multitude de forces mystérieuse, une guerre dont la seule fin sera la destruction de toute la contrée par une de ses abominables puissances, une guerre dont la seule incertitude porte sur l'identité de celui qui arrachera la dernière feuille.
Nul ne sait quand elle a commencé. Ici, il ne reste pour toute trace de vie que quelques feuilles, accrochées à de misérables arbres rabougris, et des touffes de mauvaises herbes éparses sur un sol noirci. Le vent murmure qu'un jour la contrée était plus verdoyante, même si chacun sait qu'elle n'a jamais été un éden resplendissant. Mais même lui ne semble guère convaincu par son discours. Si personne n'est là pour se souvenir d'un été, si l'automne n'est guère plus qu'un écho dans l'esprit de certain sage, alors comment savoir si cet arbre aujourd'hui décharné a un jour porté des feuilles ? En vérité, même le vent ne sait plus si cette guerre a commencé. En tout cas nul ne sait quand elle se terminera. Mais personne ne peut imaginer qu'elle puisse encore durer plus de quelques instants.
Ame perdue qui entre ici,
Se demandant où se cacher de la vie,
Sache que ce lieu n'est pas mieux qu'un autre.
Mais puisqu'il semble que tu doives exister,
C'est ici que tu vas désormais demeurer.
Ame perdue qui es mienne
Ici tu partageras ta peine.